La science de la santé change et évolue au rythme des découvertes qui s’y font. Il n’y a pas si longtemps de cela, la nanotechnologie faisait son entrée officielle sur la scène de la recherche médicale mondiale et est aujourd’hui l’un des plus importants nouveaux champs d’investigations. Chaque année qui passe, les développements et leurs résultats sont de plus en plus substantiels.
Lorsque le progrès est à porté de main, l’humanité tend la main et l’attrape, c’est dans la nature de l’homme de toujours aspirer à mieux et de trouver n’importe quel moyen pour y parvenir. Toutefois, la nanotechnologie reste par définition une simple technologie. Elle n’est en rien thérapeutique même si elle peut-être bénéfique. Ce dont on se rend compte c’est que ce qui a un apport thérapeutique incroyablement positif est de se concentrer sur les effets apaisants d’une thérapie à l’échelle humaine pour ensuite progresser collectivement dans une bonne direction.
Ce modèle évolutif de recherche (le Living Lab) sert depuis peu à développer de meilleurs traitements pour les patients à travers le monde. “Mais qu’est-ce qu’un Living Lab et quelles sont les répercussions immédiates qu’il peut avoir sur la condition de vie des patients?”. Pour répondre à ces questions mais aussi pour en savoir plus sur les développements techno/santé actuels, nous avons rencontré Patrick Dubé, coordinateur du Living Lab, une initiative reliant la SAT et l’hôpital Ste-Justine.
Q : Pour commencer, pourrais-tu définir clairement le concept de Living Lab et nous parler de ses avantages ?
R : Bien sûr. Le Living Lab est une étroite collaboration entre les usagers, leurs parents et les médecins qui les traitent, afin de trouver des mécanismes technologiques bénéfiques à leurs traitements. Avec les artistes, les programmeurs et les designers, on arrive à créer ces mécanismes et les mettre en pratique. L’approche Living Lab est particulièrement adaptée à la problématique d’humanisation des soins car l’usager y est au centre et contribue activement au développement de l’innovation qui y est créée, de l’étincelle de l’idée jusqu’à l’implantation des dispositifs!
Q : D’accord, mais comment ces dispositifs sont-ils conçus ?
R : Les dispositifs dépendent beaucoup de la technologie, et le problème c’est que quand on les développe elles restent souvent sur une tablette. Les gens ne l’utilise pas vraiment ou pas au maximum de leurs potentiels. Lorsqu’on travaille avec les usagers on peut se servir des technos dès le début du traitement. Pendant la recherche et jusqu’à la fin de la thérapie on va continuer à l’améliorer avec l’idée en tête que cette technologie là va servir pour de vrai. C’est redonner sa vrai place à la technologie que celle d’être utile à l’humanité. Pour définir les besoins de chaque projet il y a trois processus pour qu’un Living Lab marche: au début on va sur le terrain et on fait de l’ethnographie; c’est de l’anthropologie des usages. En gros on prend le temps de comprendre comment certaines technologies sont déjà utilisées, comment les patients se les approprient. C’est de l’observation pure et dure. Ensuite il y a les ateliers co-créatifs. C’est là où les usagers parlent de leur expérience et de leur besoin et où les professionnels prennent des notes et expliquent aux jeunes ce qu’ils peuvent faire.
Finalement on fait de l’expérimentation en condition réaliste d’usage avec les dispositifs développés dans le métalab de la SAT. En gros on utilise les différents appareils pendant leurs développements et on voit directement l’usage qui en est fait par les patients. Il est donc possible d’ajuster certains aspects des dispositifs si il y a des failles au design. Ces trois processus se nourrissent l’un l’autre, sans fin, et permettent aux procédés d’être amélioré. De l’observation au design, à l’expérimentation qui ramène à une observation en milieu hospitalier, etc.
Q : Ces résultats sont documentés dans des recherches scientifiques internationales?
R : Oui, c’est de manière générale porté par des universités et des centres de recherches appliquées. La méthodologie du Living Lab représente une forme de recherche inductive qui permet de générer de nouvelles hypothèse. En Europe il y a près de 300 centres accrédités de traitements et nous avons été le premier Living Lab en Amérique du Nord [à la SAT] à être reconnu comme membre de l’ENoLL à part entière.
Q : Concernant les prémisses de ce projet, quand est-ce que cette idée est devenue une initiative solide et concrète ?
R : Le projet est officiellement né en Avril 2010, mais c’est en Avril 2012 qu’a commencé la phase deux du projet, c’est à dire, le début des co-designs entre enfants malades et designers.
Q : Jusqu’à présent, quels sont les plus grands accomplissements du Living Lab selon toi?
R : Le fait d’avoir été reconnu à l’échelle nationale comme une méthode d’innovation efficace et légitime aillant mené à des prototypes fonctionnels mais aussi le fait d’avoir changé ultimement la qualité de vie de ces usagers est un énorme accomplissement en soit.
Q : Pourrais-tu nous donner quelques détails sur les grands projets en cours de développement ?
R :
On a un projet en prévention des accidents, un projet avec les grands brûlés en gestion de la douleur et un projet en trouble de la communication avec les enfants qui bégayent (ce projet est en phase 2 suite au projet pilote).
Pour le projet de prévention des accidents on a pris comme base du projet le fait qu’une grande proportion des enfants qui arrive en chirurgie à Ste-Justine ont été victime d’accidents à la maison lié à un mauvais aménagement. Donc ce projet est développé pour le département de chirurgie du CHU avec le Docteur Houle et son équipe à des fins préventive. Ce qu’on essaye de voir avec le CHU c’est si un dispositif de réalité virtuelle immersive en stéréoscopie avec des oculus rift permettrait à un parent de mieux aménager sa maison si il pouvait la regarder à travers les yeux de son enfant. Cela permettrait, j’en suis sur, de diminuer le nombre d’accidents à domicile nécessitants une chirurgie, mineure ou majeure.
Le deuxième projet est celui avec les grands brûlés pour la gestion de la douleur. Les enfants souffrants de brûlures ont deux moment dans la thérapies où la douleur est plus aigüe: lors des bains (l’eau agi comme transmetteur thermique) et lorsqu’on leur change leurs pansements. Donc ce qu’on essaye de faire dans ce projet c’est de voir comment un écran stéréoscopique immersif projetant du contenu apaisant, fixé sur un bras articulé, pourrait venir distraire le patient. Cela permettrait de rendre ces moments moins difficile pour les patients ainsi que pour les thérapeutes, qui doivent faire leur travail malgré tout.
Le troisième grand projet sur lequel on travaille est celui de téléprésence immersive pour les enfants atteint de trouble de communication, plus spécifiquement de bégaiement. Ce projet là est déjà documenté et en marche. Le problème c’est qu’on se rend compte que la thérapie avec les orthophonistes devient de moins en moins efficace avec le temps car elle n’incorpore pas assez de situations variables. Les patients s’habituent à l’environnement thérapeutique et à la présence du spécialiste ce qui réduit le facteur stress causant l’hésitation lors de la prononciation. Donc à la longue, un patient qui semble progresser est en fait prisonnier de sa condition car il ne fait ses progrès qu’en thérapie controllé, non pas dans des conditions normales d’interactions sociales. Ce qu’on fait pour recréer des situations changeante c’est de se servir de téléprésence. Le thérapeute est dans une autre pièce, mais apparait sur un écran où on peut changer son apparence en essayant de maintenir une tension thérapeutique durant la thérapie, aidant ainsi le patient à vraiment progresser. À la longue l’effet est plus propice à la guérison car le patient pratique plus souvent à gérer son stress.
Ça ce sont les gros projets du Living Lab, mais il y en a aussi 40 autres en développement en ce moment et qui ont besoin de financement.
Q : Y a t-il d’autres projets associés au Living Lab que ceux du CHU?
R :
Oui on travaille d’ailleurs étroitement avec la SAT, les entreprises du gaming, le réseau de bibliothèques de la ville de Montréal ainsi que l’école de design et société de l’Université de Montréal. À la Résidence Centre-Ville, qui est une résidence de transition pour personnes handicapés et personnes âgées, on a mis sur pied un projet pour dynamiser l’agora et les espaces partagés par les usagers. À travers l’interaction, l’immersion et les technos on veut rendre les espaces communs plus vivant. C’est un très beau projet.
En somme les accomplissement du Living Lab à l’ère du numérique pavent la voie pour que la science, l’art et la technologie collaborent étroitement, en aidant à l’échelle locale à la créations de soins plus humains pour les usagers, par les usagers. Si cette méthode aide réellement les patients à travers leurs souffrances et leurs thérapies il faudrait miser sur les impacts positifs de ces traitements et donc faire plus de recherche dans cette direction, quitte à revoir le pourcentage d’implication des Living Lab dans le système de santé actuel.